Chef d’œuvre de Ledoux
Décidée sous le règne de Louis XV, la conception de la nouvelle Saline est confiée à Claude Nicolas Ledoux, l’un des architectes proches de la cour et sans doute l’un des plus prolifiques de la fin du XVIIIe siècle. Devenu graveur puis architecte, il se fait connaître de l’entourage du roi, de la haute aristocratie et de la grande bourgeoisie en construisant de nombreux hôtels particuliers à Paris.
Par ailleurs, bon connaisseur des Salines de l’Est de la France, il se voit confier en 1774 la tâche d’édifier une nouvelle saline dont l’emplacement est décidé entre les villages d’Arc et de Senans. Après un premier projet refusé par Louis XV, Claude Nicolas Ledoux propose un ensemble de bâtiments distribués autour d’un parfait demi-cercle dont le diamètre orienté Est-Ouest est formé des bâtiments de production de sel, de la maison du directeur et des pavillons des Commis et de la Gabelle.
Le projet se veut rationnel avec une destination précise des constructions (travail, administration, habitat des ouvriers, gardiennage et contrôle) et des espaces (potagers pour les ouvriers, mur d’enceinte). La forme en demi-cercle avec la maison du directeur édifiée au centre de multiples rayons illustre la volonté de Claude Nicolas Ledoux de donner à la Saline une « forme aussi pure que celle du soleil dans sa course ».
L’ensemble est aussi conçu comme un théâtre de l’industrie édifié à la gloire du progrès et du travail humain. L’ensemble se déploie également avec rigueur, équilibre et un jeu des proportions dont le respect doit, pour l’architecte, générer la beauté. Une beauté et une force que viennent souligner bossages et avants corps, colonnes et serliennes, frontons et toitures qui, jour après jour et saison après saison, font vivre et vibrer la pierre en un spectacle aux couleurs et aux lumières toujours changeantes.
Pour parvenir à cette force de la composition, à cette harmonie picturale, Claude Nicolas Ledoux utilise tout un vocabulaire architectural emprunté à l’héritage de l’antiquité grécoromaine et à celui des grands créateurs de la Renaissance italienne (Palladio et Serlio). Une influence qui ne doit rien aux voyages (il ne s’est jamais rendu en Italie) mais tout à la profusion de compte-rendus, relevés de ruines, dessins et gravures, descriptions de monuments publiés par dizaine dans l’Europe du XVIIIe siècle.